AN
IMMERSIVE
SCORE
CHANGE OF MUSICAL STYLE
360%
THE REINCARNATION OF PETER PROUD
Peter Proud (Michael Sarrazin) est un modeste enseignant dans un collège californien. Il commence alors à faire l’expérience de rêves récurrents qui viennent le harceler toutes les nuits. Le sujet de ces rêves est toujours le même : Peter se souvient d’endroits où il n’est jamais allé, de lieu qu’il n’a jamais visité, et pourtant, tous ces détails et ces souvenirs lui donnent une étrange et incompréhensible sensation de « déjà vu ». Il comprend très vite que ces souvenirs surgissent en réalité d’une vie antérieure, alors qu’il était dans la peau d’un autre individu à une toute autre époque. Mais ces souvenirs tournent finalement au cauchemar lorsque Peter finit par voir sa propre mort, tué par une femme sur une embarcation en plein milieu d’un lac. Tourmenté par ces souvenirs d’une vie antérieure qui lui mènent la vie dure, Peter Proud décide de suivre un traitement médical pour tenter de percer le mystère de ces rêves récurrents. Mais les scientifiques qui l’examinent sont catégoriques: ce ne sont pas des rêves, car aucune machine n’enregistre une quelconque activité onirique dans le cerveau de Peter lors de ces phases de visions. Le jeune homme décide finalement de prendre lui même les choses en main et de mener sa propre enquête. C’est en regardant un jour une émission locale à la télévision qu’il croit reconnaître un lieu qu’il a déjà aperçu dans l’un de ses nombreux rêves. Il décide de s’y rendre en compagnie de sa fiancée Nora Hayes (Cornelia Sharpe). Peter y fait alors la connaissance d’une jeune femme, Ann Curtis (Jennifer O’Neill) et de sa mère Marcia (Margot Kidder). Marcia commence à suspecter dangereusement la soudaine intrusion de Peter dans son existence, lui rappelant de bien mauvais souvenirs qu’elle s’est autrefois jurée d’oublier définitivement. Marcia soupçonne des choses dans le comportement de Peter Proud, des choses qui lui rappellent quelqu’un qu’elle a bien connu autrefois. Peter finit alors par tomber amoureux de Ann. Mais le jeune homme joue désormais à un jeu très dangereux, car plus il se rapproche de la vérité, plus il risque de subir le même destin que l’homme de son existence antérieure dans ses rêves récurrents.
THE REINCARNATION OF PERTER PROUD photo DR - Cinerama Productions Corporation © 1975
45 RPM Cinevox MDF 089 Italy
45 RPM Victor VIP 2515 Japan
LP - Monogram JG 7711 United States PROMO
FULL EXPERIMENTATION ! GOLDSMITH AT THE TOP !
Adapté du roman de Max Ehrlich et basé sur son propre scénario, ‘The Reincarnation of Peter Proud’ est un thriller captivant qui aborde un thème cher au cinéma fantastique de l’époque : la métempsycose, un concept existentiel connu aussi sous le nom de ‘réincarnation’, un sujet qu’abordera d’ailleurs Roman Polanski en 1976 dans son inoubliable ‘Le Locataire’. La métempsycose est une théorie selon laquelle une même âme peut habituer successivement plusieurs corps humains, animaux ou végétaux. Cette théorie est très largement répandue dans certaines religions, et plus particulièrement dans le bouddhisme, le brahmanisme, le catharisme et chez les musulmans druzes. Le réalisateur britannique Jack Lee Thompson dresse sur ce sujet une intrigue mystérieuse et inquiétante autour des rêves récurrents d’un individu sur une existence antérieure qu’il aurait vécu dans la peau d’un autre homme.
Michael Sarrazin campe un Peter Proud solide, complètement obsédé par ses visions et bien décidé à tout mettre en oeuvre pour découvrir la vérité. Face à lui, deux grandes actrices de l’époque, la brésilienne Jennifer O’Neill et la canadienne Margot Kidder, plus connue pour être l’interprète de Lois Lane dans ‘Superman’ (1978). Le sujet s’avère être réellement passionnant et intrigant, original pour un thriller psychologique de l’époque. Le film contient aussi quelques éléments érotiques assez osés pour les années 70 (incluant une scène de masturbation féminine et un fantasme de viol qui a visiblement échappé à la censure de l’époque). La tension monte de façon très efficace tout au long de la seconde et dernière partie du film, lorsque Peter fait la connaissance de Marcia et de sa fille Ann, faisant brusquement ressurgir un sombre secret vieux de 30 ans chez la vieille mère.
Dommage cependant que la mise en scène de Jack Lee Thompson manque résolument d’éclat et de brio, alors que le même sujet dans les mains d’un cinéaste de génie comme Alfred Hitchcock aurait pu devenir véritablement grandiose et inoubliable. Au final, ‘The Reincarnation of Peter Proud’ demeure un honnête thriller psychologique des années 70 agrémenté d’un zest d’érotisme et de frissons.
Jerry Goldsmith signe pour le film de Jack Lee Thompson une partition à la fois mystérieuse, lyrique, envoûtante et sombre, toute à l’image du film. Pour se faire, le compositeur utilise son orchestre symphonique habituel auquel il couple une partie de synthétiseurs typiquement « seventies ». La partition s’articule autour d’un thème principal fédérateur, sorte de mélodie nostalgique et mélancolique associée à Peter Proud et ses souvenirs de sa vie antérieure.
Dès le générique de début, Goldsmith introduit ce très beau thème principal joué par une flûte sur fond de piano et violoncelle. Puis, très vite, les sonorités électroniques rétro prennent le dessus pour illustrer les rêves/flash-back de Peter Proud, et ce sont finalement les synthétiseurs qui reprennent le thème de façon plus mystérieuse et inquiétante, quasi surréaliste. Goldsmith s’essaie alors aux expérimentations électroniques et dissonantes qu’il affectionne tant, dans un style qui rappelle les passages synthétiques de ‘The Brotherhood of the bell’ et annonce clairement ceux de ‘Logan’s Run’ composé un an après ‘Peter Proud’, en 1976.
Comme d’habitude, même si les sonorités analogiques des synthétiseurs prêtent à sourire aujourd’hui, on reste toujours très convaincu par la façon dont Goldsmith utilise l’électronique avec une inventivité et un sens de l’expérimentation à toute épreuve. Ce sont les premières séquences de rêve qui permettent ainsi au maestro de développer ses touches synthétiques étranges, instaurant une atmosphère surréaliste et mystérieuse particulièrement saisissante. Le thème reste constamment présent, avec un côté obsessionnel qui semble évoquer une sorte de message surgissant de l’existence antérieure du héros.
Par la suite, la musique redevient plus orchestrale pour illustrer la détermination de Peter à découvrir la vérité. Goldsmith met alors l’accent sur les cordes, le piano, les bois et quelques éléments électroniques toujours présent en arrière-fond sonore. On n’est guère loin par moment du style atonal avant-gardiste/expérimental de ‘The Illustrated Man’ ici, même si ‘The Reincarnation of Peter Proud’ s’avère être bien moins audacieux que le précédent score du compositeur.
A noter l’utilisation du piano durant la scène où Peter voyage vers une autre ville en quête de réponses à ses questions existentielles. Comme d’habitude, Goldsmith se montre très inventif dans ses orchestrations, utilisant différentes techniques de jeu comme les flatterzunges de flûte, avec un goût toujours très prononcé pour un langage atonal hérité de la musique savante du 20ème siècle.
Goldsmith utilise une guitare plus intime et paisible durant la scène où Peter rencontre Ann Curtis. Mais si la musique semble suggérer une ambiance plus romantique et douce, la présence de nappes de synthétiseurs menaçants en arrière-fond sonore suggère clairement que quelque chose ne semble pas tourner rond. La musique s’assombrit progressivement au fur et à mesure où Peter Proud se rapproche de la vérité. Goldsmith utilise différentes techniques instrumentales incluant clusters, glissandi et flatterzunges de flûte pour renforcer le climat psychologique assez intense de la seconde partie du film.
Ainsi donc, la dernière partie de l’histoire permet à la musique d’osciller entre passages mystérieux et oppressants et moments plus intimes et romantiques. Finalement, le coup de théâtre final permet à Jerry Goldsmith de nous offrir un climax orchestral saisissant et extrêmement violent. On y retrouve une même férocité dans l’écriture orchestrale héritée de partitions telles que ‘Planet of the Apes’ ou ‘The Illustrated Man’. Finalement, le thème principal mélancolique et obsédant de Peter Proud revient une dernière fois pour conclure le film dans une ultime version pour flûte, piano et cordes de toute beauté.
‘The Reincarnation of Peter Proud’ demeure de bout en bout une partition absolument maîtrisée, typique de l’écriture plus avant-gardiste et dissonante de Jerry Goldsmith. Le compositeur en profite pour nous rappeler ici son goût sur pour les expérimentations électroniques, utilisant toutes les ressources des synthétiseurs de l’époque à sa disposition. La musique apporte un impact émotionnel certain aux images du film de Jack Lee Thompson, renforçant l’atmosphère sombre et psychologique de l’histoire.
En conclusion : une solide partition envoûtante de Jerry Goldsmith à redécouvrir très vite
Quentin Billard